La prescription de paracétamol en réanimation est un bon exemple d'éco-prescription. Une étude montre qu'en privilégiant la forme orale quand c'est possible, on obtient une réduction significative des consommables, des déchets et des coûts, et ceci, à qualité de soins égale.
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Parfois, le simple fait de changer la forme d'administration d'un médicament peut être très efficace sur le plan de la durabilité. Nous avons déjà évoqué en ces lignes le cas du paracétamol dont la forme orale a une empreinte carbone inférieure à la forme intraveineuse. Une nouvelle étude réalisée par l'hôpital de Bayonne confirme ces résultats. La Green Team du service réanimation (22 lits) du CH de la Côte basque, emmenée par la Dr Chloe Gisbert Mora, a analysé sa façon de fonctionner, concernant notamment l'administration du paracétamol. Elle s'est ainsi rendu compte que dans 35 à 58% des cas, la prescription par voie intraveineuse (IV) n'était pas justifiée et que la voie orale aurait pu être utilisée. Les équipes soignantes ont alors été sensibilisées à la nécessité de privilégier la voie orale pour l'administration du paracétamol dès que la voie digestive était fonctionnelle. Pourquoi? Parce que cela se traduit par une émission moindre de gaz à effet de serre (GES) ainsi que par une réduction de la consommation en eau et de la production de déchets. Les données relatives à la consommation mensuelle ont été relevées avant/après cette conscientisation du personnel. "Nous avons considéré qu'1g de paracétamol IV provenant d'un flacon en plastique ainsi que son perfuseur représentait 310g eqCO2 versus 38g pour la forme orale de paracétamol; 6,2 L versus 1,08 L d'eau consommée; 28,10g de déchets versus 1,4g. Le coût est de 0,87€ pour le paracétamol IV versus 0,02 à 0,08€ pour les différentes formes orales", précise la Dr Gisbert Mora."Pendant la durée de l'étude, le ratio de paracétamol IV/oral par mois a significativement diminué de 67%. Cette diminution est apparue dès le début du mois de janvier 2024, après l'éducation des équipes de soins pendant la première semaine de janvier 2024. Par mois, l'émission d'eqCO2 liée à la prescription de paracétamol a été significativement réduite de 31%, la consommation d'eau et l'élimination de déchets de 25 et 37% et les coûts du paracétamol ont diminué de 39% entre les deux périodes comparées. Si on extrapole ces chiffres sur un an, on estime la réduction de GES à 1,33 tonnes eqC02, de la consommation en eau de 26 m3, de la production de déchets de 118kg et le coût de 5.395€."Résultats rapides"Nos résultats montrent qu'une éco-prescription d'un médicament utilisé au quotidien peut être rapidement efficace. Les émissions de gaz à effet de serre d'une dose de paracétamol de 1g en comprimé oral sont huit fois moins importantes que celles d'une dose de paracétamol de 1g par voie intraveineuse dans un flacon en plastique, non recyclable", résume la chercheuse."Passer de l'IV au per os, ça ne coûte rien (au contraire), ça peut se faire dans tous les services et quasi du jour au lendemain. Il suffit d'informer les prescripteurs et les infirmières de pourquoi on le fait (...) On a maintenant dans le service une liste de 20 médicaments à privilégier per os", a encore commenté la Dre Gisbert Mora aux Shifters-Cercle Thématique Santé qui soulignent pour leur part l'efficacité d'une telle action de terrain rapide, un exemple à suivre par les services de réanimation, les salles de surveillance post-interventionnelle et les services d'urgence...Ces résultats sont publiés dans Intensive Care Medicine.