Lettre ouverte à Sophie Wilmès et Maggie De Block

Madame la ministre,

Votre décision récente d'autoriser les supermarchés à vendre des masques (par une modification du décret ministériel réglementant la vente dans les pharmacies) est la goutte d'eau qui, pour moi, fait déborder le vase.

Au cours des huit dernières semaines, nous avons fourni chaque jour des heures d'explications et de conseils aux citoyens venus chercher des équipements de protection (masques, gel d'alcool ...). Nous sommes le seul secteur à avoir aidé la population, littéralement jour et nuit, à comprendre les conseils et règles de santé qui changent presque tous les jours. Sans se plaindre, la profession a maintenu la garde de nuit après de longues heures de travail en journée.

La plupart du temps, les gens ne voyaient pas leur médecin (télé-consultation et /ou peur d'aller à l'urgence), mais ils nous voyaient nous à la pharmacie : directement, de près, personnellement et impliqués.

Le décret que vous publiez prévoit-il que la caissière du supermarché devra également prendre le temps nécessaire pour expliquer - avec une expertise (?!) - quand il est opportun ou non de porter un masque?

Chaque jour, nous devions nous débrouiller pour trouver les produits les plus nécessaires. Aucun des ministres compétents ne nous a aidés à cet égard. Au contraire : des inspecteurs de l'économie et des finances sont venus vérifier des collègues. Test-Achat nous a attaqué impitoyablement. Aucun ministre n'a ouvert la bouche pour expliquer que les prix auxquels nous devons acheter les équipements de protection rares sont dix fois supérieurs au prix public que Test-Achat avait bruyamment annoncé.

Le décret que vous publiez prévoit-il que la caissière du supermarché devra également prendre le temps nécessaire pour expliquer - avec une expertise (?!) - quand il est opportun ou non de porter un masque ? Comment les mettre, les enlever et les garder ? Si vous pouvez ou non les réutiliser ? Et (surtout) comment vivre et travailler chaque jour en toute sécurité ?

Car la communication gouvernementale n'atteint pas tout le monde. Les groupes les plus vulnérables de la population, au bas de l'échelle sociale ou des locuteurs d'autres langues et en particulier de nombreux patients plus âgés, ont besoin d'explications sur mesure. Il leur faut quelqu'un qui les écoute et les soutienne afin de survivre la crise, tant pratiquement que mentalement.

La Belgique compte plus de 4 800 pharmacies. Presque à chaque coin de rue. Probablement plus qu'il n'y a de supermarchés et de toute façon plus proches de la population, plus compétents et plus facilement accessibles. Nous enlever une partie de notre offre enlève aussi les ressources nécessaires pour un bon service. Ainsi que ma motivation.

Pourquoi ce coup en pleine figure ?

Et ce n'est pas le premier !

Au début du confinement, deux secteurs devaient rester ouverts : les pharmacies et les magasins d'alimentation. Je constate qu'au cours des dernières semaines, le gouvernement a non seulement ignoré les pharmacies dans presque toute sa communication, mais a essayé aussi de nous écraser complètement.

Je ne me considère pas comme un "héros", mais je sais qu'au quotidien je suis en contact direct avec des personnes malades ou qui sont sur le point de le devenir; mon risque est sensiblement plus grand que celui de l'éboueur, du boulanger, du boucher ou du chauffeur de taxi; tous des "héros".

N'ayez crainte, nous ne fermerons pas les pharmacies pour protester, car nous nous sentons trop responsables des patients qui comptent sur nous.

Je suis dans la profession depuis plus de 41 ans. Je suis tombé malade avec ma partenaire juste avant le début du confinement. Nous avons été parmi les premiers à être testés positifs. Nous nous sommes soignés seuls et nous avons été en quarantaine pendant des semaines, par précaution pour notre personnel et nos patients. Nous ne pouvons pas savoir si nous sommes suffisamment immunisés, car vous avez interdit les tests qui peuvent le prouver.

Lorsque le premier médecin généraliste est décédé récemment de Covid-19, cela a été rapporté dans tous les journaux. La semaine dernière, le premier pharmacien est décédé de la même maladie, mais rien n'a été publié à ce sujet, hormis dans nos propres canaux.

N'ayez crainte, nous ne fermerons pas les pharmacies pour protester, car nous nous sentons trop responsables des patients qui comptent sur nous.

Nous n'attendons plus rien des politiciens. Aucun soutien - que nous nous n'avons jamais obtenu de toute façon. Mais nous espérons ne plus recevoir de coup en pleine figure.

Cordialement,

Pharmacien Dirk Broeckx

Teniersplaats 2

2000 Anvers

Lettre ouverte à Sophie Wilmès et Maggie De BlockMadame la ministre,Votre décision récente d'autoriser les supermarchés à vendre des masques (par une modification du décret ministériel réglementant la vente dans les pharmacies) est la goutte d'eau qui, pour moi, fait déborder le vase.Au cours des huit dernières semaines, nous avons fourni chaque jour des heures d'explications et de conseils aux citoyens venus chercher des équipements de protection (masques, gel d'alcool ...). Nous sommes le seul secteur à avoir aidé la population, littéralement jour et nuit, à comprendre les conseils et règles de santé qui changent presque tous les jours. Sans se plaindre, la profession a maintenu la garde de nuit après de longues heures de travail en journée.La plupart du temps, les gens ne voyaient pas leur médecin (télé-consultation et /ou peur d'aller à l'urgence), mais ils nous voyaient nous à la pharmacie : directement, de près, personnellement et impliqués.Chaque jour, nous devions nous débrouiller pour trouver les produits les plus nécessaires. Aucun des ministres compétents ne nous a aidés à cet égard. Au contraire : des inspecteurs de l'économie et des finances sont venus vérifier des collègues. Test-Achat nous a attaqué impitoyablement. Aucun ministre n'a ouvert la bouche pour expliquer que les prix auxquels nous devons acheter les équipements de protection rares sont dix fois supérieurs au prix public que Test-Achat avait bruyamment annoncé.Le décret que vous publiez prévoit-il que la caissière du supermarché devra également prendre le temps nécessaire pour expliquer - avec une expertise (?!) - quand il est opportun ou non de porter un masque ? Comment les mettre, les enlever et les garder ? Si vous pouvez ou non les réutiliser ? Et (surtout) comment vivre et travailler chaque jour en toute sécurité ?Car la communication gouvernementale n'atteint pas tout le monde. Les groupes les plus vulnérables de la population, au bas de l'échelle sociale ou des locuteurs d'autres langues et en particulier de nombreux patients plus âgés, ont besoin d'explications sur mesure. Il leur faut quelqu'un qui les écoute et les soutienne afin de survivre la crise, tant pratiquement que mentalement.La Belgique compte plus de 4 800 pharmacies. Presque à chaque coin de rue. Probablement plus qu'il n'y a de supermarchés et de toute façon plus proches de la population, plus compétents et plus facilement accessibles. Nous enlever une partie de notre offre enlève aussi les ressources nécessaires pour un bon service. Ainsi que ma motivation.Pourquoi ce coup en pleine figure ?Et ce n'est pas le premier !Au début du confinement, deux secteurs devaient rester ouverts : les pharmacies et les magasins d'alimentation. Je constate qu'au cours des dernières semaines, le gouvernement a non seulement ignoré les pharmacies dans presque toute sa communication, mais a essayé aussi de nous écraser complètement.Je ne me considère pas comme un "héros", mais je sais qu'au quotidien je suis en contact direct avec des personnes malades ou qui sont sur le point de le devenir; mon risque est sensiblement plus grand que celui de l'éboueur, du boulanger, du boucher ou du chauffeur de taxi; tous des "héros".Je suis dans la profession depuis plus de 41 ans. Je suis tombé malade avec ma partenaire juste avant le début du confinement. Nous avons été parmi les premiers à être testés positifs. Nous nous sommes soignés seuls et nous avons été en quarantaine pendant des semaines, par précaution pour notre personnel et nos patients. Nous ne pouvons pas savoir si nous sommes suffisamment immunisés, car vous avez interdit les tests qui peuvent le prouver.Lorsque le premier médecin généraliste est décédé récemment de Covid-19, cela a été rapporté dans tous les journaux. La semaine dernière, le premier pharmacien est décédé de la même maladie, mais rien n'a été publié à ce sujet, hormis dans nos propres canaux.N'ayez crainte, nous ne fermerons pas les pharmacies pour protester, car nous nous sentons trop responsables des patients qui comptent sur nous.Nous n'attendons plus rien des politiciens. Aucun soutien - que nous nous n'avons jamais obtenu de toute façon. Mais nous espérons ne plus recevoir de coup en pleine figure.Cordialement,Pharmacien Dirk BroeckxTeniersplaats 22000 Anvers