Oméga-3 d'un côté, contaminants de l'autre, que faut-il penser du poisson pendant la grossesse, et de ses effets sur le développement du système nerveux de l'enfant?
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De nombreuses observations ont déjà rapporté que la consommation de poissons et/ou d'acides gras polyinsaturés (AGPI) n-3 ou oméga-3 pendant la grossesse était bénéfique pour le développement psychomoteur de l'enfant. Néanmoins, d'autres recherches n'ont pas retrouvé cet effet. Et l'on sait que le poisson est exposé à de nombreux contaminants: méthylmercure, dioxines, polychlorobiphényles et autres polluants organiques halogénés persistants. Le mercure, notamment, est connu pour ses effets délétères sur le neurodéveloppement du foetus. Ce qui amène à se poser la question suivante: qui, des oméga-3 ou des contaminants du poisson, a le plus d'impact sur le développent de l'enfant?Pour répondre à cette question, des chercheurs japonais ont mené une étude d'envergure[1] recoupant la consommation de poisson pendant la grossesse, et le neurodéveloppement de l'enfant à l'âge de 6 mois et à 1 an. Ils ont examiné les données de 81 697 paires maman-enfant de 6 mois, et 77 751 paires maman-enfant de 1 an. Les résultats, publiés dans le American Journal of Nutrition, montrent que la consommation de poisson par la maman pendant la grossesse est associée de façon indépendante à une réduction du risque de retard dans: la résolution des problèmes à l'âge de 6 mois ; la motricité fine ; la résolution de problèmes à l'âge de 1 an. Par ailleurs, les scientifiques ont constaté que l'apport alimentaire en AGPI oméga-3 est aussi associé à une réduction du risque de retard dans la motricité fine, à 6 mois et à 1 an, ainsi que dans la résolution des problèmes à 1 an. Mais il n'y a pas que les oméga-3 qui s'avèrent intéressants: les chercheurs ont trouvé que l'apport alimentaire en AGPI oméga-6 pendant la grossesse était associé à une réduction du risque de retard dans: la communication à 6 mois ; la motricité fine à 6 mois ; la motricité globale et la résolution de problèmes à 1 an. À noter que le rapport n-6/n-3 s'avère associé à une augmentation du risque de retard dans la résolution de problèmes à 1 an. Ces données montrent donc que le poisson et ses oméga-3 ont toute leur place pendant la grossesse pour ce qui concerne le neurodéveloppement de l'enfant, mais qu'il ne faut pas pour autant bouder les oméga-6, tout aussi essentiels, comme nous le rappellent les différentes recommandations nutritionnelles. Afin d'assurer tous les bienfaits de la consommation de poissons, tout en minimisant les risques de surexposition à certains contaminants, l'ANSES a défini plusieurs recommandations pour les populations sensibles, dont les femmes enceintes font assurément partie. Pendant la grossesse et jusqu'à l'âge de 3 ans, le cerveau de l'enfant est particulièrement vulnérable à l'action toxique du méthyl-mercure et des PCB. L'ANSES attire donc l'attention sur la consommation des poissons suivants pour les populations reprises dans le tableau ci-contre. Elles sont relativement simples et bien connues de tous: Consommer du poisson deux fois par semaine en associant un poisson gras à forte teneur en oméga-3 (saumon, sardine, maquereau, hareng, truite fumée) et un poisson maigre. Varier les espèces et les lieux d'approvisionnement. Ne consommer l'anguille qu'à titre exceptionnel. Pour la pêche de loisir, respecter les recommandations de non-consommation émises dans certaines zones.