A Gosselies, la Clinique Notre-Dame de Grâce a mis en place un projet pour essayer d'améliorer la récolte d'informations liées aux médicaments du patient devant subir une chirurgie élective. Il vise globalement une meilleure collaboration entre pharmaciens hospitaliers et de ville.
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"Historiquement, dans notre hôpital, le pharmacien s'occupe de la réconciliation médicamenteuse à l'entrée des patients pour chirurgie élective depuis 2008, explique Sandrine Wustefeld, directrice de la Pharmacie à la Clinique Notre-Dame de Grâce (CNDG) à Gosselies. C'était une tâche très chronophage, nous passions beaucoup de temps à enquêter pour récupérer l'information ".Ceci ajouté à la pénurie actuelle de pharmaciens hospitaliers a conduit la pharmacie à revoir son organisation : " On est parti du postulat qu'un pharmacien d'officine formé à cette pratique pourrait faire cette réconciliation médicamenteuse qui consiste à prendre l'information du patient et à la vérifier. Dans certains cas, avoir un pharmacien d'officine qui connaît les boîtes de l'extérieur, la couleur des comprimés, les ruptures de stock etc, mais aussi la réalité du quotidien de l'officine publique permet d'obtenir ces infos le plus rapidement possible. Nous avons donc engagé Marie Heremans à mi-temps avec la volonté qu'elle garde un emploi en officine. Cette complémentarité d'activités crée la plus-value de notre projet ".La mise en place s'est faite en quelques étapes clés. En dehors de l'hôpital, la première a consisté à convier les pharmaciens d'officine de la région (40) situés à 5-6 km autour de l'hôpital. " Il s'agissait de leur expliquer notre projet et de voir leurs réactions. Les trois pharmaciens qui sont venus étaient vraiment motivés par notre démarche ", indique Marie Heremans." Cela leur a permis d'exprimer certaines frustrations et, de notre côté, ajoute Sandrine Wustefeld, de leur expliquer nos contraintes pour qu'ils sachent comment et pourquoi on travaille d'une certaine façon. Ils ne savaient par exemple pas que nous avons un formulaire thérapeutique expliquant pourquoi on substitue les médicaments au cours d'une hospitalisation ". Sans oublier que les pharmaciens hospitaliers n'ont pas accès au dossier pharmaceutique partagé.Lors de la seconde étape, les documents utilisés par l'hôpital pour récolter ces données ont été revus. La pharmacie les récupère via deux canaux : une feuille bleue remise par le chirurgien au patient qui doit la remplir chez lui et la ramener à l'anesthésiste et, d'autre part, l'anamnèse médicamenteuse réalisée par l'infirmière à l'admission du patient." En théorie, commente Marie Heremans, nous recevons deux documents mais ils sont souvent incomplets. Il est donc important de croiser ces données : en cas de discordances ou de manque, on appelle le médecin généraliste ou la pharmacie habituelle du patient. Ensuite, le traitement est validé par le médecin de l'hôpital et les médicaments peuvent être distribués au patient ".La principale modification apportée à la feuille utilisée par les infirmières est qu'elle mentionne désormais cette pharmacie habituelle. La feuille bleue destinée au patient a plus mis l'accent sur l'aspect visuel pour être plus compréhensible. Les pharmaciens d'officine ayant fait observer que cette feuille n'était pas très visible, sa forme a également été revue pour un bleu plus soutenu et un papier plus cartonné. Les pharmaciens d'officine ont également proposé la réalisation d'une affiche pour inciter les patients devant être hospitalisés à leur en parler.Encore faut-il motiver les patients à la remplir... " Nous sommes allés voir chaque chirurgien pour les sensibiliser à notre projet et nous avons édité un fascicule pour aider les patients, avec par exemple une ligne du temps indiquant ce qu'ils doivent faire à quel moment "." Notre but, souligne la directrice de la pharmacie, est que les pharmaciens d'officine soient de véritables relais pour l'information des médicaments, au même titre que les médecins généralistes ".Le simple fait de se parler permet parfois de résoudre des problèmes. Ainsi, les pharmaciens d'officine peuvent se sentir très démunis devant des prescriptions de sortie problématiques et sans arriver à joindre le médecin à l'hôpital. " On leur a demandé pourquoi ils n'appelaient pas la pharmacie de l'hôpital ? Ils ont expliqué ne jamais y avoir pensé. Et nous, nous n'avions jamais imaginé que les pharmaciens d'officine ne pensaient pas à nous appeler, constate Sandrine Wustefeld. Tous les hôpitaux fonctionnent de la même façon, avec une garde, et on peut appeler l'hôpital et demander à parler au pharmacien ".Pour remédier à cette situation, l'équipe a rencontré les pharmaciens hospitaliers des environs pour leur expliquer le projet et, astuce, pour établir une petite fiche destinée aux pharmaciens d'officine reprenant les numéros de téléphone des pharmacies des différents sites hospitaliers de la région. Cqfd !Fin mai, les pharmaciens d'officine ont été conviés à une réunion d'information pour leur présenter les nouveaux documents et, cette fois, ils étaient une quinzaine à y assister.En juillet, les nouvelles fiches bleues ont été distribuées dans la CNDG et, au cours des prochains mois, la pharmacie va évaluer son projet. " Après, on a deux options : faire cette réconciliation médicamenteuse dans plus de services ou en faire à la sortie. Dans l'idéal, il faudrait faire les deux mais il faudrait aussi le budget... "Pour Sandrine Wustefeld, l'un des enseignements de ce projet est que le travail du pharmacien hospitalier est mal connu de son collègue en officine. " Mais, dans l'intérêt du patient, il faut créer des ponts que les autorités ne pensent pas à créer pour nous. Avoir une bonne information sur les médicaments permet de diminuer les durées de séjour, d'éviter des incidents... L'impact est énorme. Ça coûterait beaucoup moins cher de mettre des pharmaciens supplémentaires que de payer les interactions médicamenteuses ! "