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Éternuements, prurit nasal, buccal ou oculaire, rhinorrhée, congestion nasale, toux, larmoiements, irritabilité, fatigue... Fin janvier, le réseau national de surveillance aérobiologique AirAllergy de Sciensano a sonné le début de la saison pollinique avec l'arrivée des pollens de l'aulne et du noisetier (1). "Classiquement, on pensait que la rhinite saisonnière était associée aux allergènes extérieurs (pollens) et que la rhinite allergique pérenne était causée par une exposition à des allergènes inhalés en intérieur tout au long de l'année. Cependant, on voit que le changement climatique et la polysensibilisation peuvent compliquer ces classifications", précisent les auteurs qui ont revu le consensus international sur la rhinite allergique (RA)(2). On distingue deux types de rhinite allergique: la rhinite intermittente, définie par des symptômes subsistant pendant moins de quatre jours par semaine ou moins de quatre semaines consécutives, et la rhinite persistante, définie par des symptômes durant plus de quatre jours par semaine pendant au moins un mois. Qu'est-ce que la rhinite allergique? C'est une réaction du système immunitaire induite par une inflammation IgE médiée après l'exposition à un allergène des membranes tapissant le nez. Il s'agit le plus souvent de pollens, mais les acariens et les animaux peuvent également être à l'origine de cette réaction allergique. Cette sensibilisation peut être identifiée par des tests cutanés ou par dosage sanguin des IgE spécifiques aux allergènes. Cependant, de nombreuses personnes sensibilisées ne présentent pas de symptômes d'allergie. Les symptômes classiques de la rhinite allergique (éternuements, rhinorrhée et congestion/obstruction nasale) ne sont pas spécifiques. Le diagnostic différentiel doit exclure les autres types de rhinite: médicamenteuse (dues aux vasoconstricteurs topiques, bêtabloquants, IEC, psychotropes, AINS, cocaïne...), professionnelle (maquilleur, éleveur... et pharmacien), chimique, infectieuse, la rhinite de la grossesse, induite par la fumée, les hormones (hypothyroïdie...) ou celle liée à l'alimentation et l'alcool, vasomotrice, etc. La fréquence de la rhinite allergique pollinique a fortement augmenté au cours des trente dernières années, tout en étant très variable d'une région à l'autre. Selon Sciensano, 10% des Belges seraient allergiques au pollen d'arbres de la famille des bétulacées (bouleau, noisetier, aulne et charme) et 18% au pollen de graminées. Cette forme d'allergie qui touchait les enfants vers 8-9 ans, tend à apparaître de plus en plus tôt (avant 5 ans). Notons que 10 à 30% des personnes qui font des rhinites allergiques, font aussi de l'asthme et 80% des asthmatiques sont atteints de rhinite allergique(1). Plusieurs facteurs de risque de développement d'une rhinite allergique ont été étudiés (génétiques, l'exposition in utero ou précoce aux acariens, pollens, animaux de compagnie, allergènes fongiques, pollution, fumée de cigarette), mais les données sont contradictoires pour bon nombre d'entre eux(2). Cependant, la plupart des études suggèrent qu'un statut socio-économique plus élevé est associé à un risque accru de développer cette pathologie. Les allergies alimentaires pendant l'enfance sont un facteur de risque de RA. Quant à l'allaitement maternel (au moins 4-6 mois), il est recommandé en prévention de la RA. Enfin, sur base des données actuelles, on ne peut recommander d'exposer ou d'éviter les animaux de compagnie pendant l'enfance. Quoiqu'il en soit, ce domaine reste un sujet de recherche active. Une anamnèse bien conduite est essentielle pour faire le diagnostic d'une rhinite allergique. (voir encadré) Elle devrait être complétée par un examen physique approprié, et éventuellement une endoscopie nasale. Divers examens de laboratoire peuvent être réalisés pour consolider le diagnostic: dosage des IgE spécifiques dirigées contre les allergènes, prick-tests cutanés, tests intradermiques, test de provocation allergique nasal... La rhinite allergique met quelques années à se développer chez l'enfant, il est donc important de discuter des antécédents familiaux de RA, d'atopie ou d'asthme. Le diagnostic peut aussi être difficile dans cette catégorie d'âge, il faut être attentif à certains indices comme les lèvres gercées, la respiration de la bouche, la fatigue, l'irritabilité, le manque d'appétit et des problèmes d'attention. En cas d'allergie aux pollens, l'éviction de l'allergène est quasi mission impossible. Des mesures d'hygiène et de prévention peuvent néanmoins être recommandées. (voir page 25) Le traitement préconisé en première intention sont les corticostéroïdes intra-nasaux, en association avec des antihistaminiques intra-nasaux en cas de symptômes modérés à sévères. L'immunothérapie spécifique ou désensibilisation permet de moduler la réponse anti-allergique mais elle est longue (3-5 ans) et onéreuse. Elle est à considérer lorsque les symptômes restent modérés à sévères et interfèrent avec la vie quotidienne ou le sommeil, malgré un traitement symptomatique bien conduit. Actuellement, c'est la saison des pollens d'aulne et de noisetier et, contrairement à la tendance habituelle, la saison pollinique 2024 a commencé plus tard qu'au cours des dernières années. "Il est probable que des personnes allergiques au pollen de bouleau puissent ressentir des symptômes en cette période, en raison de la réactivité croisée avec les allergènes de l'aulne et du noisetier", indique Sciensano sur le site AirAllergy.be, le réseau belge de surveillance aérobiologique. Depuis l'année dernière, l'Institut Royal Météorologique (IRM) publie des prévisions pour le pollen de bouleau et de graminées, en collaboration avec Sciensano. Cette approche combine les prévisions météorologiques et les processus biologiques de ces plantes au fort potentiel allergisant. Cette année, une prévision du risque d'allergie au pollen d'aulne a été ajoutée sur le site de l'IRM qui indique les pollens actifs commune par commune (4) et sur AirAllergy. Un bref aperçu est également disponible via l'application mobile de l'IRM. Ces cartes prévisionnelles permettent d'aider les personnes sensibilisées à ces pollens à mieux planifier leur traitement et prendre des mesures de prévention plus efficaces. "La prévalence des allergies aux aéroallergènes augmente en raison de différentes interactions entre les changements environnementaux, notamment la pollution de l'air, le réchauffement climatique et le style de vie", précise Sciensano. "Sur les dernières décennies, les arbres allergisants comme l'aulne, le noisetier et le bouleau produisent progressivement de plus en plus de pollen. Leur saison démarre aussi de plus en plus tôt, sans pour autant se terminer plus tôt, ce qui implique une augmentation de la durée d'exposition aux pollens." Et une mise à l'épreuve supplémentaire pour les personnes souffrant de ce type d'allergie.