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D'après son acte de décès, conservé dans les archives du musée anversois de la photographie (FOMU), Louis Van Neck (parfois orthographié "Vanneck") est né le 10 janvier 1853 à Molenbeek-Saint-Jean. Il est le fils de Corneille Jan Vanneck et Marie Louise Prégaldino. On n'en sait pas beaucoup plus sur ses origines... et malheureusement, les sources disponibles pour reconstituer le reste de sa biographie ne sont pas moins lacunaires. On sait tout de même que Louis Van Neck a terminé ses études de chimie et de pharmacie au début des années 1870 et qu'il s'est installé en 1879 au n°10 du Klapdorp, une pittoresque ruelle commerçante du centre d'Anvers (l'adresse était d'ailleurs encore occupée par une pharmacie jusqu'il y a peu). Il y tient une officine doublée d'un magasin de produits chimiques. Cette information est confirmée par plusieurs éditions du livre d'adresses de Ratinckx - une sorte d'annuaire téléphonique avant l'heure qui reprend tous les établissements commerciaux de la ville d'Anvers et où notre homme figure (dans les éditions de 1882 et 1890) en tant que "pharmacien-droguiste". Les archives de l'association pharmaceutique anversoise KAVA, par contre, ne semblent avoir gardé aucune trace de Louis Van Neck, peut-être parce que, comme le donnent à penser les guides de Ratinckx, sa boutique était vraisemblablement tenue par un gérant. D'après la littérature disponible, le jeune pharmacien porte aussi "un intérêt très large à la photographie" et le MAS anversois a d'ailleurs conservé un certain nombre de photos d'archives marquées de ses initiales "L.V.N.". Il s'agit principalement de paysages urbains du dernier quart du 19e et du début du 20e siècle (entre 1875 et 1909). Dans la Felixarchief de la ville d'Anvers, le terme de recherche "Van Neck/Vanneck" livre également quelques photos de "faits divers". Il semble que le pharmacien se soit également senti appelé à documenter l'Exposition Universelle d'Anvers de 1894. Ce qui n'était initialement qu'un hobby a toutefois rapidement pris une dimension professionnelle. Au-delà de son intérêt pour les aspects techniques de la photographie, le pharmacien semble avoir aussi un certain flair pour l'innovation. Un article dans le magazine de photographie néerlandais Fotografica rapporte ainsi qu'il s'est lancé dans la fabrication de produits photographiques en sus de son activité de pharmacien et propose notamment dans sa boutique du Klapdorp tout un assortiment de produits chimiques, plaques photosensibles, lentilles et appareils photo. Toujours d'après Fotografica, Louis Van Neck commence également dès 1886 à éditer son propre catalogue, où il vante les mérites d'une vaste gamme de matériel de photographie importé de l'étranger à côté de produits "maison" qu'il fait fabriquer lui-même, peut-être par les frères Draye à Merksem. Au fil du temps, son catalogue deviendra un ouvrage des plus respectables, rapporte encore le magazine néerlandais. Le pharmacien-photographe propose également dans sa boutique divers instruments de précision tels que jumelles, microscopes ou télescopes. Il semble même qu'il ait ouvert des filiales ailleurs en Belgique. Une publicité parue dans le journal Le Soir en 1889 mentionne ainsi une adresse bruxelloise à proximité de l'actuel Centre Belge de la Bande Dessinée, mais nous avons également retrouvé la trace d'une maison Van Neck à Namur. Le fait que notre pharmacien touche-à-tout ait fini par rejoindre l'Association Belge de Photographie n'est donc pas surprenant. Jeune trentenaire, il se profile rapidement comme l'un des membres les plus actifs de sa section anversoise, dont il fera partie durant près de deux décennies (à partir de 1885-86). L'engagement des débuts semble toutefois s'être quelque peu émoussé après 1895. Comme nous avons déjà eu l'occasion de le mentionner, Louis Van Neck vendait aussi un certain nombre de produits de son cru. Les premières années de l'essor de la photographie ont été marquées par une certaine souplesse dans l'application des brevets et certains n'hésitaient pas à copier peu ou prou les inventions des autres en y apposant leur propre logo ou label. L'un des produits vendus sous le nom de Louis Van Neck (que l'on retrouve également dans les collections du FOMU) était une sorte d'appareil photo reflex avant la lettre, l' Ultime. La question de savoir dans quelle mesure le pharmacien l'a imaginé lui-même n'est pas clairement tranchée, mais certains connaisseurs avancent qu'il pourrait s'agir d'une vraie première mondiale et il est en tout cas établi que le produit a été commercialisé en Angleterre et aux États-Unis sous le nom de "Van Neck camera". En 1899, le Journal du Commerce d'Anvers annonce la mise en vente d'un grand bâtiment commercial situé au n°10 du Klapdorp "suite à une faillite". L'information a de quoi surprendre, car rien dans notre enquête ne semble indiquer que Louis Van Neck ait connu des difficultés financières, que du contraire: au printemps 1898, son offre de produits est présentée comme "la plus complète pour les projections lumineuses". Vers le tournant du siècle, on voit aussi régulièrement passer son nom dans le cadre de diverses représentations cinématographiques. Dès 1896, il dispose en effet d'un projecteur avec lequel il organise notamment des séances pour le cercle anversois d'études photographiques et scientifiques ou à la demande du gouverneur de la province. À partir de 1902, il met également sur pied des représentations publiques dans son fief anversois. Sa biographie comporte toutefois encore un autre épisode remarquable. En 1901 paraît un petit ouvrage illustré de ses photos, intitulé Een noodlottige oorlog in het land der Boeren: een bundel nota's en indrukken door mr. Louis Van Neck: apotheker, hoofd der Belgische ambulancie, naar Transvaal gezonden in 1899-1900 [Une guerre tragique au pays des Boers: notes et impressions de M. Louis Van Neck, pharmacien, chef des ambulanciers belges, envoyé au Transvaal en 1899-1900], que nous avons pu consulter à la bibliothèque universitaire de la KULeuven. Il est de notoriété publique que la guerre opposant les Boers sud-africains aux Britanniques a suscité une vague de sympathie dans nos contrées, donnant lieu à la création de comités de soutien dans plusieurs pays d'Europe et à l'envoi de convois d'aide médicale. Louis Van Neck semble avoir été l'une des chevilles ouvrières du comité local anversois. Une mission composée de volontaires belges et néerlandais part fin 1899 sous la protection de la Croix-Rouge ; le pharmacien y est responsable de l'équipement logistique de l'équipe (médicale). Malheureusement, cette intervention extérieure n'aidera pas beaucoup les Boers, qui finiront par encaisser une cuisante défaite. Dans son compte-rendu, Louis Van Neck évoque une mission difficile exigeant une bonne dose d'abnégation. Au cours de la première décennie du 20e siècle, Louis Van Neck met un terme à ses activités de pharmacien. En 1907, il cède son entreprise à un certain monsieur Reykens, qui abandonne toutefois rapidement le volet photographique des activités de son prédécesseur. Comme nous l'avons mentionné plus haut, Louis Van Neck était déjà impliqué dans des représentations cinématographiques en plein air avant sa mission sud-africaine. Par la suite, ces activités se déplacent peu à peu vers des projections en salle et, après l'abandon de son premier métier, on voir apparaître son nom en tant que directeur du cinéma Phono, une filiale du groupe belge Pathé installée sur la Keyserlei. Après 1912, notre protagoniste semble disparaître de la surface du globe. A-t-il pris sa retraite à la veille de la soixantaine? S'est-il lancé dans de nouvelles aventures? Nous n'avons malheureusement pas pu trouver la réponse. Ce qui est certain, c'est que Louis Van Neck décède le 10 septembre 1917. Il est alors domicilié Koepoortstraat, à un jet de pierre du Klapdorp. D'après son acte de décès, une nièce et un voisin font connaître la triste nouvelle - ce qui est surprenant, car il mentionne dans son petit récit sud-africain qu'il a une épouse et une fille. Une note dans les archives du FOMU précise qu'aucun faire-part n'a été envoyé et que l'ancien pharmacien a été enterré au cimetière de Kiel (transformé en parc dans l'entre-deux-guerres). Il a donc littéralement disparu sans laisser de traces. Par contre, nous savons à quoi il ressemblait. À la toute dernière page de son livre, on découvre la photo d'un quadragénaire habillé à la dernière mode, avec une barbe à la van Dyck et un chapeau, qui plonge dans l'objectif un regard plein d'assurance.