Titulaire d'une officine Multipharma à Anvers, Jan De Merlier a été victime il y a environ deux mois d'un braquage... en pleine journée. Depuis 20 ans qu'il occupe cette fonction, ce n'est pas la première fois qu'il est confronté à un incident de ce type.
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Au mois de juillet, Jan De Merlier a fait la une de la presse régionale pour avoir mis en fuite un homme de 19 ans qui s'était introduit dans son officine avec un couteau improvisé pour lui réclamer de l'argent. Lorsqu'il a lui-même sorti un couteau dissimulé sous son comptoir, le malfrat a filé sans demander son reste, rapidement poursuivi par le pharmacien. Il a finalement pu être appréhendé par la police.Entre-temps, Jan De Merlier a eu le temps de se remettre de ses émotions et de cette semaine qui n'a vraiment pas été de tout repos. Quelques jours plus tôt déjà, il avait été menacé par un client schizophrène, qui avait soudain sorti un couteau après une altercation autour d'un achat antérieur. Le patient avait même tenté à plusieurs reprises de le frapper. " Cet incident m'a nettement plus impressionné que le braquage ", souligne le pharmacien, manifestement encore sous le choc. " Lors d'un vol à main armée, on peut se dire que le danger est en principe écarté dès qu'on a cédé le contenu du tiroir-caisse... mais dans un cas comme celui-là, il est beaucoup plus difficile de prédire comment les choses vont se terminer. Que veut exactement la personne et de quoi est-elle capable ? "Après une agression verbale et physique grave et un braquage en l'espace d'une semaine, on se demande évidemment un peu si les attaques sur les officines sont en augmentation dans le quartier... mais Jan De Merlier y voit plutôt un malheureux concours de circonstances, soulignant que le dernier incident remontait à huit ans déjà. Là aussi, il avait pu maîtriser son agresseur jusqu'à l'arrivée de la police. " On réagit à l'instinct ", explique-t-il. " Cela dit, lorsqu'on se retrouve soudain avec une arme à feu sous le nez, c'est évidemment une toute autre histoire. "Le pharmacien a par contre vu fortement augmenter la fréquence des agressions verbales depuis le début de sa carrière, ce qu'il explique par le fait que les patients sont devenus plus affirmés et se fient aussi davantage aux lumières du Dr Google. La féminisa tion de la profession pourrait toutefois aussi avoir un rôle à jouer, observe-t-il encore, évoquant le cas d'une collègue qui avait, il y a quelques années, été visée à plusieurs reprises par les mêmes agresseurs en l'espace de quelques semaines.De tels incidents et son expérience personnelle ont évidemment contribué à sensibiliser Jan De Merlier aux risques de la profession. Comme nombre de collègues des environs, il a pris un certain nombre de mesures de sécurité et veille à ce que son équipe puisse en parler librement. " Les criminels s'imaginent manifestement que les pharmacies ont beaucoup d'argent en caisse, et la meilleure mesure de précaution reste donc de la vider régulièrement. Certaines officines n'acceptent même plus que les paiements par carte, mais je peux comprendre que cela ne plaise pas forcément aux clients. "" D'autres, par exemple dans le quartier défavorisé du Seefhoek, ont choisi - même en journée - de faire sonner les clients avant de les servir, éventuellement à la porte ", raconte le pharmacien anversois. Il se souvient aussi d'un séjour à Séville, il y a quelques années, où il a vu de ses yeux un collègue espagnol servir ses clients de derrière un comptoir... protégé par des barreaux ! Lui-même ne se verrait pas en arriver à de telles extrémités. " Si la situation devait se dégrader à ce point, je préfèrerais arrêter complètement ", affirme-t-il, soulignant que la profession comporte aussi pour lui un aspect social incontournable, dont le contact direct avec les clients et la fidélisation font partie intégrante. " Cela dit, je comprends très bien que certains collègues décident, suite à des expériences négatives, de faire les choses autrement. "Une bonne solution pour accroître le sentiment de sécurité des pharmaciens pourrait être d'installer des caméras de surveillance dans les officines (très fréquentées), estime Jan De Merlier. Il faudrait aussi améliorer la communication entre les prestataires/victimes et le parquet concernant les décisions de ce dernier. " Quelques jours après l'incident, j'ai vu mon patient schizophrène [voir plus haut, ndlr] installé en terrasse juste en face de mon officine. (d'un ton irrité) J'aurais tout de même aimé être informé qu'il avait été libéré après son arrestation. " Quid des formations d'autodéfense, de gestion de l'agressivité, etc. ? " Elles ont certainement leur utilité, mais d'un autre côté, chaque attaque ou agression est différente... "" Je ne me sens pas en danger ou mal à l'aise dans mon officine ", souligne Jan De Merlier en pensant à l'avenir. " Je reste toutefois réaliste. J'ai encore au moins 15 ans de carrière devant moi, et le risque de subir d'autres incidents de ce type n'est pas inexistant. "