L'Ordre des Pharmaciens a adapté son règlement d'ordre intérieur. Les sanctions à vie prévues dans sa précédente mouture ont été supprimées.
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"Une série d'articles ayant trait aux sanctions, et plus précisément à l'effacement et à la réhabilitation, ont été ajoutés au règlement d'ordre intérieur, mais dans l'ensemble, celui-ci reste le même", expliquent le directeur Rien Marinus et la juriste Sylvie Van Overstraeten. Cette modification découle de la nouvelle législation européenne en matière de protection de la vie privée. Rien Marinus: "tout le monde connait aujourd'hui la réglementation RGPD, à savoir la description des durées de conservation qui régit le traitement des données au niveau européen. Suite à son entrée en vigueur, nous avons mené notre enquête auprès des autres ordres, belges ou européens, dans le but de définir la position de l'Ordre des Pharmaciens en matière de conservation des dossiers. Devions-nous changer les délais de conservation des sanctions disciplinaires?" De quoi s'agit-il précisément? "Jusqu'à présent, un pharmacien frappé d'une sanction voyait sa peine inscrite à vie dans son dossier. Il était donc impossible d'annuler cette sanction. Aujourd'hui, certaines peines mineures (avertissement, censure et réprimande) seront automatiquement effacées après cinq ans, pour autant qu'aucune nouvelle sanction disciplinaire n'ait été prononcée entretemps." Il s'agit donc bien ici d'une suppression automatique, qui ne nécessite aucune démarche particulière du pharmacien. "Quand il est question de suspension ou de radiation, nous n'utilisons pas le terme d'effacement, mais bien celui de réhabilitation", poursuit Rien Marinus. "Un pharmacien qui, au cours de sa carrière, a été suspendu ou radié, pourra introduire une demande de réhabilitation, respectivement six et dix ans après la condamnation auprès du Conseil d'appel." "Nous allons assurément recevoir ce type de demandes, car les ajouts au règlement d'ordre intérieur sont entrés en vigueur le 1er mars dernier", intervient Sylvie Van Overstraeten. "Si ces demandes sont recevables, elles seront traitées par le Conseil d'appel. Le ou la pharmacienne concernée sera alors entendue et le conseil jugera de la pertinence de la réhabilitation." Le nouveau règlement appliqué depuis le 1er mars a un effet rétroactif. "Ce qui signifie que nous avons entamé l'effacement automatique des sanctions remontant à 2018, pour autant que les conditions soient remplies, bien entendu." "Pour nous, pharmaciens, il s'agit là d'une petite révolution", assure Rien Marinus. "Cela fait des années que nous nous sommes faits à l'idée qu'une sanction nous suivrait toute notre vie et voilà qu'aujourd'hui, celle-ci peut être effacée après cinq ans." La nouvelle réglementation a été soigneusement préparée en coulisse. "Nous avons travaillé d'arrache-pied avec nos informaticiens pour régler les aspects techniques. L'effacement automatique implique en effet que notre base de données permette d'accéder à toutes les sanctions des années précédentes et de vérifier qu'elles répondent bien aux conditions requises." La communication autour du nouveau règlement a également nécessité des efforts particuliers. "Le guichet électronique de notre site web s'est ainsi vu agrémenter d'un module supplémentaire, permettant aux pharmaciens de s'enregistrer et d'avoir une vue d'ensemble des sanctions, et de celles qui ont été effacées." Un effacement ou une réhabilitation est également portée à la connaissance du conseil provincial, car cet acte a évidemment des conséquences directes pour le pharmacien. "Une personne frappée d'une sanction plus grave qu'un avertissement n'était par exemple plus éligible pour un mandat au sein de l'Ordre. Il n'en sera plus ainsi aujourd'hui, puisque son 'casier' pourra à nouveau être vierge après cinq ans. Dans le même ordre d'idée, nous pourrons à présent rendre un avis positif quand les universités nous demandent si tel ou tel pharmacien peut être maître de stage", ajoute-t-il. Enfin, l'Ordre constate un glissement du type de plaintes contre les pharmaciens. "Depuis 2020, une plus grande liberté entoure la publicité. Nous recevons davantage de plaintes de patients que de collègues pharmaciens. Les citoyens semblent se montrer moins tolérants envers les pharmaciens qu'avant la pandémie de Covid. Une tendance que nous constatons d'ailleurs aussi dans d'autres métiers de la santé", conclut l'intéressé.