En juillet dernier, le Centre hospitalier de Wallonie picarde a obtenu le niveau platine de l'accréditation Canada. Retour d'expérience sur la démarche suivie dans la pharmacie hospitalière avec Brigitte Dubois, pharmacienne chef de service.
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La démarche d'accréditation a concerné tous les services de l'hôpital ", précise Brigitte Dubois, pharmacienne en chef au Centre hospitalier de Wallonie picarde (CHWapi) à Tournai. " La pharmacie était partante et motivée parce que cela permettait d'une part, d'évaluer notre organisation en se basant sur un référentiel externe et, d'autre part, de poursuivre les actions pour améliorer la qualité des soins au bénéfice du patient. "Décidée en novembre 2017, cette démarche a réellement démarré début 2018 et l'hôpital a accueilli la visite officielle de l'équipe d'accréditation en juin 2019.Comment ça s'est passé ? L'ensemble des collaborateurs du CHWapi ont travaillé sur 19 référentiels et près de 3000 critères. La pharmacie s'est appuyée sur un référentiel, celui relatif à la gestion des médicaments qui comportait environ 139 critères. Le tout complété par l'identification et la mesure d'indicateurs permettant d'évaluer la performance ou l'évolution positive liée aux mesures mises en place." Il a fallu animer et motiver les équipes et, vu le timing serré, il fallait traiter rapidement les obstacles ou difficultés rencontrées pour les critères dont l'évolution était tributaire d'une collaboration et d'investissements majeurs, y compris de la part des personnes extérieures à la pharmacie. Le référentiel 'gestion des médicaments' est en effet un logiciel transverse puisque les médicaments circulent dans tout l'hôpital ", fait-elle observer.Des réunions de débriefing régulières ont permis de suivre l'avancement et d'en informer les équipes pour les motiver et les mobiliser pendant tout le processus." On a détaché un mi-temps pharmacien, désigné chef du projet. Par rapport à l'ensemble des critères, on a établi une répartition entre les pharmaciens, en fonction de leurs compétences. Parmi les critères, il y avait par exemple les POR (pratiques organisationnelles requises) relatives aux médicaments à haut risque : on a listé ce qui existait déjà et on s'est assuré que les mesures prises ou à mettre en place seraient maîtrisées et appliquées dans toute l'institution. " Ainsi, un comité de coordination 'accréditation' a garanti une approche globale du processus.Un tel travail ne va pas sans heurts. Pour Brigitte Dubois, la difficulté majeure a consisté à dégager des ressources et à coordonner l'ensemble de la démarche et des priorités relatives aux autres référentiels auxquels la pharmacie contribuait aussi : " Forcément, outre notre référentiel 'gestion des médicaments', pour lequel nous sollicitions des personnes externes (infirmiers, médecins, services logistiques et techniques...), d'autres services nous sollicitaient également. Par ailleurs, ce qui était difficile c'était la standardisation des pratiques dans un environnement évolutif, parfois spécifique à certaines disciplines et, pour la pharmacie, cadré par une législation importante. "Pourquoi se lancer dans ce type de démarche ? " L'objectif était la qualité des prestations ; l'amélioration de la satisfaction patient mais également des professionnels en terme de service rendu par la pharmacie ; l'harmonisation des pratiques dans un souci d'efficience accrue ; et une meilleure intégration de la pharmacie au sein de l'institution ", apprend-elle.En outre, l'accréditation a aussi été l'occasion de revoir les pratiques et processus existants, de rédiger ou mettre à jour des procédures et modes opératoires, d'établir des fiches techniques plus didactiques, et d'informer et de former les personnes en pharmacie et à l'extérieur.Le premier résultat visait bien sûr l'obtention de l'accréditation platine. " À côté, la place du patient est centrale, ajoute la pharmacienne : pour lui, c'est à la fois l'assurance d'une prise en charge qualitative et sécuritaire des soins, mais également de son intégration comme acteur de son traitement. Pour les collaborateurs, cela a permis d'avoir un sentiment de fierté et de reconnaissance par rapport au travail accompli. Ensuite, cette démarche a également facilité une intégration plus forte entre les équipes et une meilleure compréhension des contraintes des uns et des autres permettant un fonctionnement transversal plus efficient. Nous avons encore mis en place un outil de gestion documentaire pour consulter en ligne des procédures et des documents techniques. Enfin, nous avons adapté les plans de formation et créé un plan d'accompagnement spécifique pour les nouveaux engagés. "Concernant les patients, le CHWapi avait déjà l'intention d'aller vers une organisation plus axée sur la pharmacie clinique. " En novembre, nous allons démarrer en gériatrie. Notre objectif est de diminuer le temps pharmacien passé sur l'opérationnel. Grâce aux processus mis en place, nous espérons orienter de plus en plus nos activités vers la pharmacie clinique et donc accentuer la présence des pharmaciens dans les unités de soins. On a également renforcé le contact avec le patient dans le cadre de l'information (fiches...), notamment au guichet patient "." Le référentiel de gestion des médicaments et le processus d'accréditation ne sont pas un one shot, c'est vraiment un processus d'amélioration continue, assure-t-elle. Notre logique est de consolider les acquis, d'améliorer encore les critères et de poursuivre l'actualisation des procédures et documents. Nous devons rester vigilants sur la régularité des audits et des actions à mener en cas de pratiques ou de résultats non conformes. Et, bien entendu, nous nous préparons à la version suivante : les accréditations sont remises tous les trois ans, il faut donc rester mobilisé et ne pas s'endormir "." Pour moi, cette démarche a été extrêmement positive et constructive parce qu'elle a mobilisé l'équipe et qu'elle a permis de faire comprendre, au sein de l'hôpital, le côté transversal de notre activité. Les critères ont mieux mis cette notion en évidence et nous avons peut-être aussi mieux communiquer à ce sujet. Cela permet de changer l'image de la pharmacie dans l'hôpital et de montrer que si nous avons une législation extrêmement lourde, c'est une plus-value en termes de qualité et sécurité pour le patient ", conclut Brigitte Dubois.