Une proposition de loi pour lutter contre la pénurie des médicaments relance le débat sur un droit de substitution systématique des médicaments accordé aux pharmaciens. Les associations de médecins sont divisées sur le sujet.
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Mardi 3 décembre, la commission de la Santé de la Chambre a approuvé une proposition de loi qui vise à éviter les pénuries de médicaments et en atténuer les effets. Elle fixe plusieurs mesures : les sociétés pharmaceutiques doivent signaler plus rapidement et de manière plus détaillée l'indisponibilité d'un médicament et signaler s'il s'agit d'un problème de distribution, d'un arrêt de la commercialisation ou d'une réelle indisponibilité. La loi prévoit également d'interdire ou de limiter l'exportation de médicaments en pénurie.Le texte fixe également le cadre légal de la faculté de substitution des pharmaciens si un médicament n'est pas disponible. La proposition de loi a fait réagir directement le syndicat médical Absym qui "s'oppose catégoriquement à l'octroi du droit de substitution systématique au pharmacien pour les médicaments manquants dans son officine." L'association souligne que la substitution peut être une source de confusion. " Consciente de la problématique croissante de l'indisponibilité des médicaments ", l'Absym exige que cette substitution soit strictement encadrée. "Préalablement à la substitution, le pharmacien doit consulter le médecin prescripteur afin de l'informer de l'indisponibilité d'un médicament prescrit. Ensemble, avec le médecin, le pharmacien choisira le médicament qui sera substitué au produit manquant. "Thomas Orban, président de la Société scientifique de médecine générale, appelle au pragmatisme. "La substitution des médicaments équivalents (Switch) est indispensable pour alléger la surcharge générée par les indisponibilités. Si on peut éviter de recevoir tous les jours des coups de fil pour discuter avec les pharmaciens de la substitution d'un médicament par un médicament équivalent, je ne vois pas pourquoi on ne le ferait pas. " Le Dr Orban précise que grâce au site du CBIP, tout médecin peut vérifier en temps réel la disponibilité d'un médicament. "De plus, l'Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS) a mis en ligne sur son site l' application PharmaStatut (lire encadré), qui propose un arbre décisionnel pour trouver un médicament en cas de pénurie. "Le président de la SSMG compte voir avec l'Association pharmaceutique belge s'il ne serait pas possible que le médecin traitant reçoive automatiquement une notification dans son dossier médical lorsqu'un pharmacien substitue un médicament par un autre. Cette traçabilité immédiate permettrait d'éviter des discussions avec les patients qui s'étonnent d'avoir reçu un autre médicament que celui prescrit initialement.Le Groupement belge des omnipraticiens estime que la position de l'Absym sur la substitution est trop radicale et un peu datée. C'est pourquoi le syndicat des généralistes francophones a voulu rédiger un communiqué commun avec l'APB. "Il est important d'avoir un dialogue ouvert et constructif, d'apprendre à se connaître pour mieux appréhender les atouts et les difficultés vécues par les deux métiers. C'est le chemin que le GBO et l'APB ont choisi de mener avec d'autres acteurs comme, par exemple, la SSMG pour le côté francophone."APB et GBO estiment dès lors que "le pharmacien a un droit de substitution dans le cas strict de pénurie d'un médicament. La solution trouvée au terme d'un débat tient compte de la réalité du terrain tout en garantissant la continuité des traitements et tout en préservant l'intention thérapeutique du prescripteur".Si le devoir d'informer le patient est un préalable important, "la responsabilité du pharmacien envers le patient et son médecin est majeure. Il est important que le patient reçoive le médicament auquel il est habitué mais lorsque celui-ci est indisponible, il faut assurer que le traitement puisse continuer de manière sûre avec une alternative identique".Face au problème croissant des pénuries, les pharmacies se retrouvent parfois à ne pas pouvoir délivrer exactement le même médicament. Pour le GBO, "c'est l'intérêt des patients et la continuité des soins qui priment et doivent être au centre des discussions. C'est sur ces bases d'écoute réciproque que les dossiers compliqués peuvent avancer, c'est la voie choisie."GBO et APB demeurent attachés au dialogue "avec toutes les parties représentatives de la médecine générale au nord comme au sud".